VISITE BRÈVE DE MARANA

PRÉSENTATION

Après 4 kilomètres de route secondaire bien aménagée et entretenue par les malades eux-mêmes, à travers une forêt qui a été plantée par les premiers malades de Marana il y a plus de 100 ans, sous la conduite du Frère Dursap, un pionnier de l’œuvre avec le Père Beyzym, nous saluons le Maître d’œuvre de Marana depuis les origines en 1892 : Saint Joseph. Nous pénétrons dans l’enceinte du Marana plus que centenaire où le Père Jean Beyzym, jésuite polonais, béatifié par sa Sainteté Jean Paul II à Cracovie en 2002, accueillit et installa ses « oisillons noirs » comme il aimait appeler ses chers malades.

La chapelle où l’on peut admirer les sculptures du Père Beyzym lui-même, avec l’image de Notre Dame de Tchetosckowa dans un cadre en bois, finement sculpté aussi par le Père, ainsi que le tabernacle et l’inscription : « Venez tous à Moi ». Ne disait-il pas : « Rien n’est trop beau pour le Bon Dieu ». Les deux corps de bâtiments : service des hommes et service des femmes avec leurs cours fleuries sont encore des vestiges solides et fonctionnels des travaux réalisés par le Père Beyzym.

En 1910, sur la demande expresse du Père Beyzym, Mère Anne-Marie de la Visitation Clerget de Saint Joseph de Cluny, se porta volontaire pour venir servir les pauvres entre les pauvres. Elle y passa 57 ans de sa vie missionnaire sans jamais revoir sa Bourgogne natale. Elle repose dans le cimetière de Marana ainsi que Sœur Irénée Rasoamihanta, première sœur malgache volontaire pour le soin des lépreux.

LA VIE À MARANA AUJOURD’HUI : LES MALADES

Du miroir qu’était la léproserie à ses débuts, Marana est devenu au fil des ans un village structuré où s’épanouit une « Grande Famille ».

L’accueil : Tout malade qui frappe à notre porte est accueilli, examiné. S’il n’est pas atteint de la lèpre, nous le recevons provisoirement, soit pour l’orienter vers d’autres centres médicaux, selon son cas ou pour assurer des soins urgents, des analyses, des radios… Après quelques jours, il repart. S’il atteint de la lèpre , il est accueilli immédiatement comme interne : lavé, habillé, nourri, logé, soigné gratuitement ainsi que des membres de sa famille, même non lépreux, si c’est nécessaire. Il s’intègre à la Grande Famille et prend sa part d’activités, selon la mesure de ses possibilités physiques. Il assure sa lessive et cuit son repas s’il le peut. Ces menus travaux et activités sont le complément thérapeutique psychologique des soins médicaux pour éviter au malade de se replier sur sa maladie. Ainsi il se sent utile.

Les soins : ils sont assurés par 2 sœurs infirmières, 4 ou 5 aides-soignantes en permanence, des chirurgiens, anesthésiste, dentiste, qui viennent selon les besoins pour des opérations et soins dans notre bloc opératoire, cabinet dentaire, ou pour des consultations.

Le traitement actuel de PCT (poly chimiothérapie), fourni par l’OMS permet des guérisons et donc c’est un va et vient continuels de malades. A la lèpre cependant, s’ajoutent d’autres maladies qu’il faut traiter conjointement pour espérer une guérison solide : tuberculose, parasitoses, dermatoses, carences nutritionnelles, paludisme… Des malades guéris reviennent, aussi pour le traitement de « maux perforants plantaires » séquelles de la lèpre, dus aux longues marches en brousse et qui sont parfois longs à cicatriser.

L’alimentation saine, variée, équilibrée fait partie intégrante des soins. Le travail, si minime soit-il, au service de la « Grande Famille » fait aussi partie des soins. La préparation des fêtes, le chant, les détentes sont un complément très efficace aux soins. « Chacun travaille que sa santé  le lui permet, les chants et les rires sont à l’ordre du jour» écrivait le Père Beyzym. C’est encore vécu aujourd’hui à Marana.

Un dispensaire est ouvert 2 matinées par semaine pour les malades des alentours. Des tournées en brousse, dans 2 régions très touchées par la lèpre, sont assurées mensuellement.

L’ÉDUCATION, LA FORMATION, LA VIE SOCIALE POUR PRÉPARER LES RÉINSERTIONS

Il existe sur place une classe maternelle et cours préparatoire pour les enfants malades ou encore petits. Un cours d’alphabétisation pour les adultes. Quelques jeunes, après leur guérison, suivent une formation professionnelle de base, d’autres suivent un cycle primaire normal dans des écoles et centres à l’extérieur avant de repartir chez eux.

Le Respect de l’environnement, de la propreté, de l’hygiène, du règlement, les travaux en commun pour le village deux matinées par semaine, l’entraide fraternelle par la prise en charge des invalides, les travaux à l’atelier de couture, dans les jardins et au village, à la ferme et au poulailler, sur la route et dans la forêt, à l’atelier et au grenier à riz…sans négliger l’apprentissage de la lutte contre les feux de brousse, tout cela aide les malades à sortir d’eux-mêmes, à se former sur le tas et à se préparer à repartir chez eux. Cela leur facilite la réintégration au sein de leurs communautés villageoises car il n’est pas toujours facile de « se remettre debout » et retrouver sa place, même en famille, lorsqu’on a été « lépreux »

Les micro-projets : c’est une aide ponctuelle, financière ou en matériel, que nous réfléchissons avec quelques malades, jeunes en général, pour les aider à repartir dans la vie. Quelques exemples : construction de case, terrains achetés et mis en valeur, matériel agricole de base, semences, bœufs pour le travail, porcelets, machine à coudre et tissu, outils pour le travail de bois… Des malades guéris acceptent de rester quelques temps pour nous aider : ainsi Charles et Harivao avec leurs 4 enfants, lui est chauffeur, elle assure la classe maternelle ; Roger a reçu une formation de cordonnier et il fabrique les sandales sur mesure pour tous ceux dont les pieds sont mutilés.

La vie de Foi : Nous recevons tout malade de la lèpre, quelle que soit sa croyance mais nous l’invitons et l’initions à la prière. Le peuple malgache croit en Dieu Créateur, Zanahary. Sa vie est jalonnée de prières à l’occasion des évènements : naissance, maladies, fêtes, voyages, décès… Ainsi à Marana, Dieu est présent, la prière est vivante. La cloche appelle ceux qui le désirent pour la prière du matin à la chapelle suivie de l’Eucharistie par notre aumônier. L’Angélus sonne matin, midi et soir. La catéchèse est assurée par l’aumônier, des sœurs, et même des malades catéchistes selon les groupes et les besoins. Selon les années, nous célébrons des baptêmes d’enfants et d’adultes, des communions, des confirmations, des mariages et aussi le Sacrement des malades. La liturgie fait l’objet des soins particuliers, nous y formons nos malades.

Chaque jour, à 16h, tout Marana récite le chapelet aux intentions de l’Eglise, du monde, des malades et des bienfaiteurs

CONCLUSION

Marana, maison des Pauvres entre les Pauvres, où chacun se sent riche et porté par la prière, la souffrance, le dévouement, la Joie, la Prière et la Paix de tous. En 2011, nous célébrerons le Centenaire de l’entrée des premiers malades dans les locaux construits avec tant d’amour par le Bienheureux Père Beyzym durant 9 années. Nous célébrerons le centenaire du Service Missionnaire des Sœurs de Saint Joseph de Cluny , filles de la Bienheureuse Anne-Marie Javouhey en ce Haut-Lieu de Marana, au milieu de la forêt et des montagnes, dans un cadre qui porte vers Dieu. En 2012, nous célébrerons le centenaire du Retour à la Maison du Père du Missionnaire Bx Père Jean Beyzym sj.

Nous lui laissons le dernier mot :

« Je ne sais si je serai jamais en état de remercier convenablement la Vierge Marie pour sa protection. Je ne parle plus de mille autres grâces qu’Elle m’a accordées mais de celle de m’utiliser au service des lépreux »

Sœur Catherine
(Congrégation des sœurs de St Joseph de Cluny)